Comité d'Action Juridique

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Témoignages

Un départ, deux installations !

01/02/2022


Au cours du premier rendez-vous, le propriétaire nous a bien expliqué le contexte. Le fermier historique en place avait déjà pris sa retraite, vendu les vaches et transmis le droit au bail à sa femme exploitante. Celle-ci souhaitait officiellement rejoindre un GAEC voisin et lui transférer le foncier. Cette pratique d’agrandissement sans installation, courante en Haute-Savoie, permet de s’affranchir de la demande d’autorisation d’exploiter mais nécessite d’obtenir l’accord du bailleur.
Cette obligation est soit pas respectée, soit formelle car les  propriétaires ne sentent pas légitimes à intervenir dans les accords entre paysans.
Dans le cas présent, après le porté à connaissance de la situation, la question de la légitimité de la demande s’est bien évidemment posée. Est-ce qu’un propriétaire peut se substituer aux initiatives officielles pour éviter les agrandissements? Le CAJ74 a considéré qu’au vu de l’échec patent des politiques publiques à éviter le contournement du contrôle des structures, cette requête était recevable. Quant à la clause environnementale qu’il souhaitait imposer, nous lui avons rappelé qu’elle n’est légalement utilisable que par des acteurs reconnus. Même si bien évidemment, le réseau INPACT pouvait faire connaitre ses souhaits auprès de porteurs de projets conformes à ses attentes.
Mais refuser le transfert du droit à exploiter au GAEC ne suffisait pas pour réussir à installer, d’autant plus que le parcellaire était morcelé. Il a fallu des démarches actives pendant 2 ans, avec des réunions de conciliation locale menées par le propriétaire, pour que le GAEC accepte de renoncer à s’agrandir et voit son intérêt dans une  réorganisation du parcellaire.
Voilà un cas qui illustre bien que si la règle initiale d’accord du transfert par le propriétaire n’existait pas ou était contourné, l’implacable mécanique départ/agrandissement se serait mise en oeuvre. Mais cela démontre aussi que le contrôle des structures dans ce type de cas n’est pas assez contraignant, et que seule une forte volonté locale d’acteurs non-institutionnels de refuser cette dérive peut déboucher sur une véritable transformation du paysage agricole.