Défendons les Tribunaux paritaires des baux ruraux
Le Comité d'action juridique Rhône-Alpes a adressé le 22 décembre 2012 au gouvernement une lettre ouverte pour la préservation des Tribunaux paritaires des baux ruraux (TPBR), avec le soutien de magistrats professionnels et de juges assesseurs
Le tribunal paritaire des baux ruraux (TPBR) est une juridiction spécialisée, liée au tribunal d’instance, qui juge les litiges entre preneurs et bailleurs de baux ruraux. Des réunions à l’initiative du ministère de l’agriculture traitent de l’avenir du TPBR et certains scénarios envisagent leur suppression. De plus, dans un rapport d’information du 11 juillet 2012, Mme Nicole BORVO COHEN-SEAT et M. Yves DETRAIGNE, sénateurs, proposent la création d’un « tribunal de première instance », ce qui aurait des répercussions sur le TPBR.
Le Comité d’action juridique, association loi 1901 pour l’accès au droit en milieu rural, apporte un appui juridique participatif aux ruraux et assiste régulièrement des parties devant les TPBR de la région Rhône-Alpes. Ses membres ont pu mesurer la facilité d’accès au juge que permettent les spécificités de cette juridiction et de la procédure actuelle (présence d’assesseurs élus, proximité géographique, procédure orale, absence de ministère d’avocat obligatoire,…).
C’est pourquoi le Comité d’action juridique exprime son attachement au TPBR dans une lettre ouverte argumentée et a sollicité le soutien des magistrats et des assesseurs de cette juridiction dans la région Rhône-Alpes, ainsi que des syndicats de magistrats.
La lettre ouverte du Comité d’action juridique Rhône-Alpes a été cosignée par le Syndicat de la Magistrature, 55 assesseurs, quatre magistrats professionnels et le Syndicat de la Propriété Privée Rurale de Haute-Savoie.
Le Comité d’action juridique a transmis sa lettre ouverte, et la liste de ses soutiens, aux syndicats agricoles pour qu’ils se saisissent de la question, et aux ministères de l’agriculture, de la justice et de l’égalité des territoires pour qu’ils la prennent en compte dans leur réflexion.
Lettre ouverte : quel avenir pour les Tribunaux paritaires des baux ruraux ?
LETTRE OUVERTE DU COMITÉ D'ACTION JURIDIQUE :
- Au Ministre de l'agriculture
- Au Ministre de la justice
- Au Ministre de l'égalité des territoires et du logement
- Aux syndicats agricoles
COSIGNÉE ENTRE AUTRES :
- Par le Syndicat de la magistrature
- Par de nombreux juges en région Rhône-Alpes
(voir la liste complète des soutiens en bas de page)
Télécharger la lettre ouverte (504 Ko)
Les litiges survenant entre bailleurs et preneurs de baux ruraux relèvent de la compétence des Tribunaux Paritaires des Baux Ruraux (TPBR) (L. 491-1 code rural). Chaque TPBR est composé de cinq juges : un juge professionnel, deux assesseurs preneurs élus par les preneurs inscrits sur la liste électorale et deux assesseurs bailleurs élus par les bailleurs inscrits sur la liste électorale.
Les TPBR sont des juridictions spécialisées dont l'accès est parmi les plus faciles et les plus ouverts. Ils participent d’une relation équilibrée entre fermiers/métayers et bailleurs et permettent de régler les litiges dans une procédure orale, simple, peu onéreuse au sein d’un tribunal proche du terrain et des justiciables et laissant la place à la conciliation.
Des réunions initiées par le ministère de l’agriculture au printemps 2012 abordent l’avenir des TPBR et envisagent, parmi différents scénarios, leur suppression. En parallèle, un rapport d’information ( La réforme de la carte judiciaire : une occasion manquée), rendu le 11 juillet 2012 par Mme Nicole BORVO COHENSEAT et M. Yves DÉTRAIGNE, sénateurs, proposent des pistes de réflexion dont la création d’un « tribunal de première instance »(TPI) qui remplacerait le Tribunal de Grande Instance (TGI) et intégrerait les TI actuels. Ces deux évènements sont l’occasion d’affirmer notre attachement à plusieurs spécificités tenant à l’organisation et à la procédure applicables devant ces juridictions.
Nous sommes favorables à la conservation d'une juridiction spécialisée comportant des juges élus
Nous sommes attachés à une juridiction spécialisée garantissant une proximité géographique aux justiciables
Les Tribunaux Paritaires des Baux Ruraux sont actuellement rattachés aux tribunaux d’instance. Le rattachement aux tribunaux d’instance permet une couverture géographique favorisant l’accès au juge. Par suite de la réduction du nombre des Tribunaux d’Instance (TI), découlant de la réforme de la carte judiciaire, le nombre de TPBR a également été réduit.
Le rapport d’information du 11 juillet 2012 propose, comme piste de réflexion pour l’avenir, la création d’un « tribunal de première instance »(TPI) qui remplacerait le Tribunal de Grande Instance (TGI) et intégrerait les TI actuels. Si cette piste de réflexion était retenue, nous nous prononçons pour le maintien de TPBR placés auprès de chaque antenne du service d’instance du TPI, ceci pour maintenir une proximité géographique entre cette juridiction spécialisée et les justiciables en dépendant.
Le maintien des TPBR en tant que juridiction spécialisée nous semble primordial. En effet, de même que le droit du travail rééquilibre le rapport de force entre salariés et employeurs, le droit rural le fait entre locataires et propriétaires de terres et bâtiments agricoles. Code du travail et code rural viennent donc, au nom de l’intérêt général, encadrer la liberté contractuelle
Appliquer ce juste équilibre pour chaque litige demande une connaissance particulière du droit et des réalités liées à ces contrats spéciaux. L’existence de juridictions spécialisées - Conseil des prud’hommes et Tribunal Paritaire des Baux Ruraux - est donc nécessaire car elle permet une spécialisation des juges. La spécialisation du TPBR découle, entre autres, de la présence d’assesseurs non professionnels et d’un magistrat professionnel le présidant.
Cette spécialisation d’un juge professionnel présidant le TPBR n’occasionne pas de surcoût puisque ce magistrat n’est pas affecté exclusivement au TPBR mais est l’un des juges du tribunal d’instance.
Nous sommes attachés à une désignation élective des assesseurs, à l’échevinage et au paritarisme
Les dernières élections se sont déroulées en janvier 2010. Elles ont rencontré quelques difficultés : retard de deux ans dans leur organisation, établissement laborieux des listes électorales, inauguration du vote par correspondance, etc. Le taux de participation relativement faible peut s’expliquer en partie par le fait que la période d'inscriptions sur les listes était au mois d’août. On a aussi noté un taux élevé de suffrages non valables, liés essentiellement à la confusion lors du vote entre TPBR et Commission Consultative des Baux Ruraux (CCBR).
Ces difficultés ne doivent pas occulter les avantages que présente la présence d’assesseurs élus pour un accès à la justice large et efficace.
Les assesseurs amènent une connaissance du terrain, complémentaire des compétences juridiques du juge professionnel, ce qui permet une meilleure appréciation des faits et donc un meilleur jugement.
La présence d’assesseurs facilite, également, le transport du tribunal sur les lieux, possibilité plus simple, plus efficace pour apprécier une situation complexe et moins onéreuse pour les parties que la désignation d’un expert judiciaire. En effet, les assesseurs ont une connaissance technique de la réalité rendant inutile le recours à un expert judiciaire.
L’échevinage permet aux justiciables des TPBR d’être jugés par leurs pairs. Ainsi, l’acceptation des jugements par les parties est accrue.
Enfin, le caractère paritaire du TPBR est garant de l’impartialité du tribunal et de l’équilibre entre les droits et les obligations des parties.
Nous sommes favorables au maintien d'une procédure orale, sans ministère d'avocat obligatoire et comportant une audience de conciliation
Nous sommes attachés à la saisine du TPBR par déclaration
La saisine par déclaration plutôt que par assignation permet de limiter les coûts pour le justiciable et permet une procédure plus simple et compréhensible.
Nous sommes favorables au maintien du caractère oral de la procédure
La procédure orale favorise une expression plus directe et plus facile que l’écrit. Cette procédure orale est le corollaire de la présence d’assesseurs élus au sein des TPBR et de la faculté laissée aux parties de se défendre par elles-mêmes.
Nous sommes attachés à la tentative de conciliation obligatoire
Même s’il rentre toujours dans la mission des juges de concilier les parties, il nous paraît efficace de formaliser cette mission de conciliation par une audience de conciliation à laquelle les parties doivent en principe être obligatoirement présentes.
Nous sommes attachés à la faculté laissée aux parties de se défendre par elles-mêmes ou de se faire assister ou représenter de façon large
Devant les TPBR, le ministère d’avocat n’est pas obligatoire. Les parties peuvent choisir de se défendre par elles-mêmes ou d’être assistées ou représentées par leur conjoint, un membre de leur famille, un membre ou salarié d’organisation professionnelle agricole ou un huissier de justice. Cette possibilité augmente les chances d’aboutir à une conciliation, réduit les frais de défense, favorise l’accès au juge et a une incidence sur l’atmosphère du tribunal : les non professionnels du droit (assesseurs, parties et personnes les assistant ou les représentant) peuvent ainsi prendre place au sein des TPBR et participer à la pratique du droit.
Ainsi, les TPBR nous semblent un bon exemple de la participation des citoyens à la justice. Cette réalité pourrait servir d'exemple pour d'autres contentieux.
Lettre ouverte ayant reçu la signature de :
Magistrats professionnels :
- Mme BARTHE-BOUGENAUX Dominique, juge du tribunal d’instance de Grenoble, présidant le TPBR
- Mme CONSTANT, vice-présidente du tribunal de Lyon affectée au tribunal d’instance de Villeurbanne
- Mme GREINER Pascale, juge du tribunal d’instance de Romans
- M. GREINER Philippe, président du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu
Syndicats :
- Syndicat de la Magistrature
- M. DE VIRY Pierre, président du syndicat de la propriété privée rurale de Haute-Savoie
Assesseurs de Tribunaux paritaires des baux ruraux :
M. ARFI Gilles, assesseur preneur suppléant, TPBR de Grenoble / M. ARTIGE Jean-Marie, assesseur preneur titulaire, TPBR de Aubenas / M. AVRIL Henri, assesseur bailleur suppléant, TPBR de Vienne / M. BADEL Guy, assesseur bailleur suppléant, TPBR de Privas / M. BELLON André, assesseur bailleur suppléant, TPBR de Valence / M. BESSON Maurice, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Montbrison / M. BETEMPS Gérard, assesseur bailleur suppléant, TPBR d’Annecy / M. BOCQUET Louis, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Annecy / M. BONNET Yves, assesseur preneur titulaire, TPBR de Villefranche / M. BONVIN Denis, assesseur suppléant / M. BROTTET Paul, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Lyon / M. CHAUVIN Régis, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Montélimar / M. CHEMINAL Bruno, assesseur preneur suppléant, TPBR Montbrison / M. CLAVEL Serge, assesseur preneur suppléant, TPBR de Bourgoin-Jallieu / M. CONSEIL François, assesseur preneur suppléant, TPBR de Bonneville / M. CRESTON Maurice, assesseur bailleur suppléant, TPBR de Privas / M. DE TARLE Henri, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Vienne / M. DE VIRIEU Geoffroy, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Bourgoin / M. DUINAT Paul, assesseur bailleur suppléant, TPBR de Roanne / M. DUPENLOUP Roger, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Annemasse / M. DURAND Yves, assesseur preneur titulaire, TPBR de Villefranche / M. FESCHET Michel, assesseur preneur titulaire, TPBR de Montélimar / M. FINAZ Denis, assesseur bailleur suppléant, TPBR de Bourgoin-Jallieu / M. FLORENCE Gil, assesseur preneur suppléant, TPBR de Aubenas / M. FOILLARD Daniel, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Villefranche / M. FOMBONNE Michel, assesseur preneur suppléant, TPBR de Valence / M. FORESTIER Jean, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Bonneville / M. GAUTRONNEAU Pierre, assesseur preneur suppléant, TPBR de Valence / M. GEX FABRY Laurent, assesseur preneur suppléant, TPBR de Thonon / M. GINIER-GILLET Alain, assesseur preneur suppléant, TPBR de Grenoble / M. GIPPET René, assesseur preneur titulaire, TPBR de Bourgoin / M. GIRAUD Cédric, assesseur preneur titulaire, TPBR de Villefranche / M. GRILLET Olivier, assesseur preneur suppléant, TPBR de Annecy / M. GUIDICI Alain, assesseur preneur suppléant TPBR de Montélimar / M. LEMONON Alain, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Vienne / M. LEON Gilles, assesseur preneur suppléant, TPBR de Privas / M. LIONNETON Pascal, assesseur preneur suppléant, TPBR de Annonay / M. LYONNET Christophe, assesseur preneur suppléant, TPBR de Roanne / M. MAILLET CONTOZ Gérard, assesseur preneur suppléant, TPBR de Bonneville / M. MANOS Guy, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Belley / M. MATRAY Joseph, assesseur bailleur suppléant, TPBR de Roanne / M. MEUNIER Jean-Paul, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Villefranche / M. NALLET Gérard, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Grenoble / M. OLLAT Armand, assesseur bailleur suppléant, TPBR de Romans / Mme PASTIAUX-MAGNIER Laurence, assesseur preneur suppléant, TPBR de Annonay / M. PERROT MINOT Thierry, assesseur preneur suppléant, TPBR de Romans / M. PERTREUX Alfred, assesseur preneur suppléant, TPBR de Nantua / M. PEYREMORTE David, assesseur preneur suppléant, TPBR de Montélimar / M. PEYROT Serge, assesseur preneur suppléant, TPBR de Saint Etienne / M. PITIOT Gérard, assesseur preneur suppléant, TPBR de Saint-Etienne / M. REYMOND Marcel, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Saint-Etienne / Mme RICHARD Marie-France, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Bourgoin / M. ROCHE Fernand, assesseur bailleur titulaire, TPBR de Montbrison / M. TROULLIER Michel, assesseur bailleur suppléant, TPBR de Romans / M. VACHOUX Stéphane, assesseur preneur suppléant TPBR d’Annemasse.